POINT 1 › Je suis née à Bristol. Où ça exactement ? Un hôpital, je ne me souviens plus vraiment lequel mais après tout, ce n'est pas vraiment important. Je n'habitais pas un quartier de riche, j'habitais en banlieue, là où le glamour n'a pas sa place mais je m'en suis plutôt bien sortie. Fille unique de mes parents, notre relation a toujours été compliquée. Ils semblaient attendre beaucoup de moi, que je m'élève dans la société, qu'ils puissent parler de moi avec fierté sauf que nous n'avions pas l'argent pour ça et c'est compliqué d'aller loin sans argent.
POINT 2 › Si le quartier où j'ai grandi n'avait rien de bien intéressant, le petit voisin l'était bien plus. Il était mon seul ami au départ, celui avec qui je passais tout mon temps, nous étions inséparables et même si je me suis faite d'autres amis par la suite, il restait mon meilleur ami, celui qui me comprenait mieux que quiconque. Loan et Luna, c'était tout un duo à l'époque mais toute chose a un commencement et une fin, une fin qui eu lieu à l'aube de notre quinzième année. Aucun de nous deux ne sait vraiment ce qui s'est passé ce jour-là et pourtant, il en résulta cinq longues années de silence.
POINT 3 › Au fond, je sais très bien ce qui s'est passé ce jour-là mais je préfère ne pas y penser. Loan, c'était mon meilleur ami, celui avec qui je partageais mes rêves de partir loin de ce quartier, de faire de ma vie quelque chose. Ce jour-là, je voulais partir avec lui. Il a dit non, du moins il a rappelé qu'il avait sa famille et clairement, ça voulait dire qu'il les choisiraient à moi alors je ne l'ai pas supporté et je suis partie, juste comme ça. Je voulais qu'il me choisisse, passer en premier pour lui mais c'était trop demander à un gamin de quinze ans, évidemment. Je ne pouvais pas l'accepter alors j'ai couper les ponts, je ne supportais plus l'humiliation que j'avais subie ce jour-là et je voulais lui faire payer ça alors moi aussi j'ai changé, je suis devenue une autre, une véritable peste, notamment avec lui et j'avais besoin de lui faire comprendre que je n'avais pas besoin de lui alors je traînais avec d'autres personnes, je le narguais sans cesse mais au fond, c'était à moi-même que je faisais le plus de mal.
POINT 4 › Ma fierté a eu raison de cette longue amitié et pendant cinq longues années, j'ai dû me passer de lui. Ce n'était pas facile mais je tenais bon parce que je rencontrais de nouvelles personnes, je sortais beaucoup et surtout, je savais que je ne pourrais pas faire de longues études alors pourquoi insister. Si j'étudiais beaucoup, c'était devenu bien moins fréquent, préférant m'amuser avec mes amis. Pourtant, ça ne m'empêchait pas de dévorer le moindre livre que je trouvais dès que j'avais une minute. Je rêvais souvent à la vie que j'aurais pu avoir si j'avais été riche mais malheureusement, ce n'était pas ma vie.
POINT 5 › Dès que j'ai pu, j'ai cherché du travail afin de gagner un peu d'argent, le genre de petits boulots comme babysitter, livreuses de journaux, femme de ménage, promeneuse de chiens, serveuse et aujourd'hui, j'ai un travail plutôt stable dans un hôtel qui n'était pas vraiment réputé pour être glamour lui non plus, le genre où on emmène sa maîtresse si vous voyez ce que je veux dire. J'en vois des choses étranges mais je ne juge pas, tout le monde est libre de vivre la vie qu'il veut après tout.
POINT 6 › La sexualité est une drôle de choses et personnellement, je n'ai jamais tenu à me mettre d'étiquette. Il n'est pas question d'être avec un homme ou bien une femme, le coeur choisi une personne et le reste importe peu. Le fait est que le mien ne choisit pas forcément ce qui est bon pour moi mais ça, c'est un autre problème. L'amour, c'est encore plus étrange et même si je suis sortie avec des personnes auparavant, ça n'a jamais été le grand amour, celui pour qui on serait prêt à tout, je ne l'ai encore jamais connu.
POINT 7 › Récemment, alors que j'avais un jour de congés, j'en avais profité pour sortir avec des amis et là, un ange tombé du ciel était apparu, le genre de garçon qu'on ne voit que dans des films, il était charmeur et drôle. Il n'a pas fallu longtemps pour que je tombe dans ses filets et c'est bien ça qui a provoqué ma perte et la sienne par la même occasion. Même si j'aime flirté, ça ne fait pas de moi une fille facile pour autant sauf que j'ignorais encore comment il pouvait être, le genre à qui l'on ne dit pas non, le genre qui prend sans même demander la permission. Il était bien trop fort pour moi, je n'avais aucune chance de pouvoir partir alors j'ai fini par abandonner ma lutte, me laisser faire et attendre que ça soit fini, les larmes coulant sur mes joues, mes lèvres saignant à fort de les avoir trop mordues.
POINT 8 › La patiente n'a jamais été mon fort alors j'ai rassemblé le peu de force qu'il me restait et je l'ai poussé, sûrement un peu trop fort. Il a chancelé. Il a glissé. Sa tête a heurté le rocher qui se trouvait là. J'étais prête à partir, à m'enfuir alors qu'il me pourchasserait sauf qu'il ne l'a jamais fait. Il n'a plus jamais re-bougé depuis cet instant où sa tête avait heurté ce rocher. J'avais vérifié mais rien. Prise de panique, j'avais fuit et j'étais allé voir la seule personne qui pourrait me comprendre, je ne l'avais pas vu depuis cinq ans, il m'avait sûrement oublié... J'avais frappé à sa porté, désespérée, prête à me faire jeter dehors mais ça non plus ça n'est jamais arrivé, pas avec Loan.
POINT 9 › Je suis entrée, je lui ai raconté ce qu'il s'était passé, du moins j'ai d'abord essayé mais les mots qui sortaient de ma bouche n'avaient aucun sens. Comment réfléchir alors que mes yeux étaient gonflés, mon maquillage avait coulé et que je pouvais encore sentir le sang couler dans ma bouche. Pourtant, je devais me reprendre et au prix d'un effort surhumain, j'ai enfin expliqué ce qui était arrivé. J'étais une véritable épave, perdue dans un océan de pleurs et de peurs. Qu'est-ce que j'allais devenir ? J'avais tué un homme, je ne pourrais pas m'en sortir comme ça. Et puis Loan avait prononcé ces mots. Il m'avait demandé de ne rien faire, de rester chez lui tandis qu'il m'avait demandé l'endroit où tout ça était arrivé. J'étais restée chez lui jusqu'à ce qu'il revienne. Je ne lui avait pas tout dit concernant cette soirée, je n'avais pas pu me résoudre à admettre ma faiblesse, je lui avais juste dit que j'avais dit non, pas jusqu'où ça avait été, pas jusqu'où j'avais attendu pour le repousser. Il ne fallait pas être idiot pour le deviner, surtout quand le corps en question se révélait être à moitié nu dans la poussière. Il était revenu et il avait décrété que rien de tout cela n'était arrivé.
POINT 10 Officiellement, rien n'était arrivé. Officieusement,
c'était le bordel dans ma tête. J'avais tué un homme, son visage hantait mes nuits. Aussi mauvais qu'il puisse être, je savais qu'il ne méritait pas le sort qu'il avait eu. Tué par accident puis caché. A ce moment-là, je savais que Loan était le genre de personnes que je ne pouvais pas laisser partir et encore moins abandonner une nouvelle fois, pas par peur qu'il aille tout révéler mais par logique. Aucune autre personne n'aurait été capable d'un tel geste et je le savais. A ce jour, il reste le seul homme capable de me toucher un minimum, pas intimement évidemment, c'est bien trop récent et j'ai besoin de temps pour digérer tout ça mais je sais que je peux compter sur lui. D'ailleurs, je passe le plus gros de mon temps chez lui et même s'il l'ignore, j'ai quitté mon ancien logement, j'ai mis mes affaires chez mes parents mais je ne veux pas le lui dire, je ne veux pas qu'il se sente obligé de m'héberger alors je lui mens, une nouvelle fois, je prétends rentrer chez moi alors que je vais chez mes parents où chez des amies, après tout nous ne sommes plus à un mensonge près.