Sometimes, truth hurts more when you're hidding it (Adriana)

Mon retour à Bristol ne s'est pas fait très en douceur, il faut se l'avouer. Entre mon retour à la maison, mes retrouvailles avec les colocs, le retour à la routine et la soirée de la veille célébrant mon retour en ville, j'ai eu la tête dans le cul tout au long de la journée. Cet après-midi, je me suis réveillée au pied du lit de Chuck, avec Keeran couchée sur ma poitrine, ce qui pourrait sembler étrange, mais chez nous, c'était normal, tout à fait banal. Je la repousse délicatement avant de sortir de la chambre sur la pointe des pieds, direction la salle de bain. Ce qui veut dire retour à la routine, veut aussi dire retour au boulot et ce soir j'étais de service au Watershed club. Même si je n'ai pas le profil exact d'une barmaid, il ne faut pas se fier aux apparences, car je suis assez douée dans mon domaine. J'évite de dire à mes potes que je travaille dans ce club, parce que les connaissant, ils viendraient tous foutres le bordel, comme les vrais zigotos qu'ils sont. Je souris suite à cette pensée et je commence à ma préparer en prenant des cachets d'aspirines au passage, regrettant ma soirée de la veille.

Robe un peu trop courte ajustée d'un peu trop près à mon corps, je salue les clients qui me regarde et je me dépêche de prendre place derrière le bar. Il faut bien que je fasse des efforts vestimentaires pour avoir le profil de l'emploi si je veux gagner assez de pourboire ce soir pour rentrer en taxi. Car c'est connu, à la fin de mes heures de travaille au club, je ne marche plus très droit, je n'ai plus les idées lucides et j'ai l'haleine qui empeste l'alcool, mais putain, qu'est-ce que j'aime ce boulot. Puis je le vois là bas, même de dos je pourrais le reconnaître parmi toute une foule de gens. Claio. Je ne l'avais pas vu depuis quelques mois, alors que j'étais à Rio tout l'été pour rendre visite à ma famille. On avait échangés plusieurs emails, mais je ne l'avais pas encore informé de mon retour en ville, préférant lui faire la surprise lorsqu'une opportunité se présenterait. Et il faut croire que c'était ce soir, le grand soir. J'attrapa rapidement un verre que je remplis de bourbon avant de me diriger vers lui, sourire en coin. Déposant le verre devant lui, j'attends qu'il se retourne, le fixant de mes grands yeux bleus océan. « Gracieuseté de la maison. » Puis, il se retourne et tout de suite, je peux lire la surprise dans son regard. Contournant le bar, je me dirige vers lui rapidement et je le prends dans mes bras avant de m'éloigner et de le regarder en souriant. « Alors, je t'ai manqué ? »

Même si j'avais la tête dans le cul, la gueule de bois et une humeur légèrement massacrante, j'étais heureuse de me retrouver ici. Je ne pouvais pas nier que cet endroit m'avait manqué. Jamais j'aurais penser un jour que mon boulot me manquerait, mais c'était le cas. Six mois passé en dehors de la ville et à mon retour, j'ai cette étrange impression que rien n'avait changé, que tout était comme avant. Que ce soit ici, au club ou même à l'appart. C'était pas si mal, moi qui pensait devoir me réajuster à la routine et tout ce que viens avec, j'étais agréablement surpris de voir que je m'en sortais avec une grande facilité. Plusieurs clients réguliers me salue, je leur souris, avant de prendre place derrière le bar. Puis je le vois, il est là, seul. Claio. Mon ex, mon ami. Je sais pas trop quel synonyme lui donner, il a été mon ami avant d'être mon amant, mais il a aussi été mon amant tout en étant mon ami. C'était assez complexe quand j'y pense. Je ne connais pratiquement personne qui reste ami avec ses ex, mis à part moi. La preuve : Andy et Claio. Quoique pour Claio, ça va de soi, car il a toujours été gentil avec moi, notre relation est fusionnel, pas comme avec Andy. C'est malsain, toxique. Ça fait mal au coeur, comme une déchirure, mais assez parlé de lui. J'avais envie de m'amuser ce soir, de fêter mon retour au boulot, mon retour en ville et Andy étant absent, il ne gâchera pas ce moment, pour une fois. Alors autant en profiter.

Je contourne rapidement le bar et je vins me blottir dans ses bras. Je ferme les yeux et j'inspire doucement. Sa chaleur et son odeur m'avait manqué, je me sentais tellement en sécurité à cet instant précis que je n'avais plus aucune envie de relâcher mon emprise, mais je me recule finalement, en le contemplant du regard. Il était toujours aussi canon.  Et bin merde. Je suis le roi d'Angleterre. J'éclate de rire en fronçant les sourcils, me demandant s'il était déjà bourré. « T'es déjà torché ? » J'éclate de rire de nouveau, alors qu'il me ramène vers lui, m'enlaçant dans ses bras. Étant beaucoup plus petite que lui, je relève la tête et je dépose mon menton contre son torse, histoire de le regarder dans les yeux. « Trop longtemps. Je comptais te faire la surprise, débarquée chez toi avec une bouteille de whisky après mon service au club, mais t'as été beaucoup plus rapide de moi à c'que je vois. » Je m'éloigne puis sans prévenir je me penche sur le comptoir et j'attrape une bouteille de gin et un verre. Le regard complice, je remplis nos deux verres et le regard brillant de « À nos retrouvailles ! » Puis je m'enfile ce dernier d'un coup, sans plus attendre, comme si ma vie en dépendait.

À peine mon service au club commencé et j'avais déjà quelques verres dans le sang. C'était probablement ça le désavantage à travailler dans un bar, se bourrer la gueule rapidement était beaucoup trop facile. Mais c'était en partie le plus gros avantage aussi. Parce qu'être bourrée au boulot sans devoir d'explication à son patron et sans avoir à supporter les regards suspects des clients, c'était la belle vie. Parce qu'ils étaient là pour ça eux aussi. Vous vous compreniez en quelque sorte, sans aucun jugement. Je rigole intérieurement, me demandant une fraction de seconde d'où pouvait bien venir toutes ces pensées idiotes qui me traversaient l'esprit. Parce que je m'en fichais bien des jugements des autres, des clients. J'étais là que pour travailler et me bourrer la gueule à volonté et gratuitement, le reste avait peu d'importance. Jusqu'à ce que je le vois. Claio. Lui avait de l'importance et j'ai su dès le moment où je l'ai vu, que ma soirée au boulot ne serait pas ordinaire, monotone, parce que nous avions quelque chose à fêter. Mon retour. Nos retrouvailles. Santé.

Nah, je pensais justement à toi en me disant qu'il ne serait pas possible que je te croise ce soir. J'éclate de rire en nous servant un verre de gin. C'était bon de le retrouver, ça faisait longtemps. Il m'avait manqué. J'ai tellement de chose à lui dire, à lui raconter, mais je ne sais pas par où commencer, alors je prends une longue gorgée de mon verre avant d'éclater de rire suite à sa remarque; Fait gaffe, babe, j'ai pas envie qu'un connard disparaisse avec toi dans les bras. Nos rires s'entremêlent en unisson et ça m'amuse. On a toujours eu le même genre de délire et c'est ce qui faisait qu'on s'entendaient si bien. Je penche la tête sur le côté et le fixe droit dans les yeux, l'air malicieuse. « Même si ce connard, c'est toi ? » J'hausse les épaules, un sourire en coin. Claio était loin d'être un connard, c'était qu'une façon subtil de lui faire comprendre que finir la nuit dans ses bras ne serait pas un problème pour moi. Même si je savais bien que notre relation ne se résumait plus à ça depuis quelques temps déjà. Malgré notre rupture, notre complicité était resté intact et c'était ça le plus merveilleux dans notre relation. « J'suis prête à parier qu'on fini la nuit ensemble. » J'éclate de rire, l'alcool commençant à faire effet dans mon système. Je le défie du regard en haussant les épaules. « Si je termine la soirée torchée, t'as intérêt à me ramener, Bussby. » Puis, je me sers un nouveau verre.