Freak out (Evan)

Depuis qu’Evan vivait chez Hellias, le blond était sur un petit nuage. Il l’avait pour lui tout seul, enfin, à part quand il était en cours. S’il était en cours... A vrai dire, Hellias avait peur qu’il lui mente, qu’il le manipule. C’était étrange parce que jusqu’ici, c’était plus le blond qui avait joué ce rôle. C’était bien lui qui lui disait quoi faire quand le faire, mais Hellias avait ce pressentiment. Cette affreuse impression qu’il pouvait maintenant utiliser ses faiblesses pour l’anéantir. Il n’aimait pas le mensonge ni les cachoteries et s’il venait à apprendre quelque chose qu’il ne savait pas sur Evan, il en serait déçu et c'était un euphémisme. Il lui avait offert un portable pour qu'il puisse le contacter plus souvent. Depuis cette histoire avec son ex, il n'était pas du tout tranquille. Il l'avait vu sourire, heureux qu'on lui donne un cadeau d'une telle valeur.

Ils s’étaient couchés ensemble. Depuis qu’Evan était là, les nuits du blond était moins agités. Il l’avait embrassé, l’avait câliné avant qu’il ne ferme les yeux, et Hellias avait suivi. La nuit se passait bien, jusqu’à ce que le visage d’Arlo en train de faire du mal au brun défila dans sa tête. Hellias se reveilla en sursaut et son regard bifurqua directement à côté de lui afin de s’assurer intérieurement, que ce n’était rien de plus qu’un cauchemar : sauf qu’il ne trouva pas Evan à côté de lui. Son cœur battait à tout rompre.

- Evan ? appela-t-il en fouillant dans toutes les pièces de l’appartement.

Il n’était pas là. Il passa une main dans les cheveux, essayant de réfléchir, mais à quoi ? Il était présent il y a quelques heures, voire peut être même quelques minutes. Il l'appela sur son portable, mais tomba six fois sur sa messagerie, avant de remarquer qu'il ne l'avait pas pris avec lui. Il s’habilla, enfila ses chaussures, et parti à sa recherche. La panique s’insinuait en lui. Il vivait dans un quartier pauvre, malfamé, qui sait ce qu’il pouvait lui arriver dès qu’il passait cette fichue porte.

Il traversa les rues, gagna les ruelles sombres, mais il ne le voyait pas. Il commença à s’énerver intérieurement et donna un coup de pieds dans une poubelle qui tomba et régurgita son contenu au sol. Il trouva un couteau, semblable à celui d’Arlo. Il écarquilla les yeux, et se mit à courir dans toutes les rues.

Evan était chez Hellias, il était apaisé. Du moins c'était ce qu'il croyait. Il croyait que tout allait s'arranger, mais chaque jour,
il avait peur que Byron ne l'attrape et l'empêche de voir Hellias définitivement. Il s'était également disputé avec James et avait appris qu'Arthur avait été agressé. Il sentait le ton accusateur de James quand il parlait de lui et Hellias. Et plus ça allait, plus Evan ne croyait plus en rien.
Il tentait d'y cacher. Il ne voulait pas qu'Hellias ne voit qu'Evan n'allait pas.
Pourtant, chaque jour qui passait, Evan allait de mal en pire. Il pensa même à une solution mais il n'avait pas le droit de le montrer à Hellias. Hellias était gentil avec lui. Il lui avait même offert un téléphone pour éviter de piquer celui de la famille. Et c'était comme un cercle vicieux. Il avait peur de faire du mal à Hellias alors il voulait se faire du mal. Et s'il se faisait du mal alors il ferait du mal à Hellias. Et Evan était au bout.

Il se réveilla en pleine nuit, laissant Hellias dormir. Il prit simplement sa veste et un couteau qu'il trouva chez Hellias. Et il se traita de lâche.
Il avait peur. Pourtant ils avaient tous raison de vouloir le voir plus là.
Et cette fausse raison lui redonna le courage. Il sortit de l'appartement d'Hellias. Il avait peur en pleine rue. Il avait peur de tout. C'était qu'un trouillard. Il regarda la lame du couteau. Il se vit l'appuyer contre son poignet. Il vit le sang commencer à couler mais il s'arrêta là. Il avait bien trop peur. Il jeta le couteau dans une poubelle comme s'il était fou et il se réfugia sur un banc, regardant son poignet sanguinolent. Il avait été trop lâche pour aller jusqu'au bout. Et Hellias ne voudrait plus de lui.

Il fut secoué de sanglots et comme avec Arthur, il remonta ses genoux contre sa poitrine. Il entendit alors du bruit et il frissonna. S'il avait tout perdu, alors il devait s'habituer à ça.

Sur le couteau que Hellias avait trouvé par terre, il y avait du sang. En tout cas, le sien ne fit qu’un tour. Il était persuadé que c’était celui d’Evan. Il le savait, le sentait. Il avait envie de pleurer, là tout de suite. Il était à bout de nerfs, et sentait qu’il était bien sur le point de craquer. Pourtant, il en avait vécu des choses difficiles, mais il avait l’impression que ce qu’il lui arrivait en ce moment était bien pire que tous les évènements traumatisants dans sa vie.

Il courait, encore et encore, la respiration haletante, qui commençait à lui manquer. Il s’arrêta deux secondes, toujours aussi paniqué, les mains sur les genoux, entrain de cracher ses poumons noirs de goudron. Puis, en relevant la tête, il vit une silhouette dans la pénombre, sur un banc. Il s’approcha doucement, et entendit des pleurs. Il comprit qu’il s’agissait d’Evan. Il arriva lentement pour ne pas l’effrayer, et vint s’asseoir à côté de lui.  

- Pourquoi tu as fait ça Evan… ? Tu sais que c’est dangereux de sortir le soir, surtout en ce moment… souffla-t-il en prenant délicatement sa main dans la sienne.

Il sentit de l’humidité sur la sienne. Il vit un liquide sombre sur sa paume. Il comprit que c’était du sang. Il tira son poignet, paniqué et vit qu’il était tailladé.

- Qui t’as fait ça Evan ? Qui ? Dis-moi tout de suite ! ajouta-t-il, tendu.

Donc il avait eu la bonne intuition pour le couteau. C’était surement le sang d’Evan.

Evan entendit la voix d'Hellias, au loin. Il sentit sa main dans la sienne. Il releva la tête, acceptant les reproches d'Hellias. Et il se blottit contre lui. Il posa la question de qui avait fait ses entailles sur son poignet et Evan se mordit la langue. Il devait lui dire la vérité. Il ne pouvait pas mentir parce qu'il était seul dans la rue et que mentir n'arrangerait rien. Mais il avait peur de dire la vérité à Hellias. Peur de le perdre. Alors il s'accrocha à lui et il murmura:

"C'est moi.... moi parce que je....."

Il s'interrompit et tenta de se contrôler avant de cacher son visage contre lui et reprendre dans un murmure:

"Tout va mal Hellias... tout... Et ce n'est pas de toi que je parle... mais tout le reste... Je n'y arrive plus..."

Il n'arrivait plus à rien, c'était sûr. Et maintenant qu'il avait parlé, il était sûr qu'Hellias le rejetterait. Qui voudrait de lui de toute manière? Il tenta de garder ses sanglots à l'intérieur et il reprit d'une voix tremblante:

"Si tu veux plus de moi... je le comprendrais... je suis pas intéressant;.. je suis juste un gamin qui n'arrivera jamais à rien...."

Il avait reprit les mots de Byron. Lui non plus ne croyait pas en Evan. Personne n'y arrivait.  

Lorsque Evan avoua que c'était lui qui avait tailladé son avant bras, Hellias fronça les sourcils. Il ne le croyait pas.

- Je suis sûre que c'est Arlo ! Je suis sûre qu'il t'as dit de me dire que c'était toi, mais c'est lui en vrai c'est ça? Lança-t-il, à bout de nerfs.

Meme si il était assis, il bougeait nerveusement les jambes, les mains, il avait encore plus de mal à tenir en place et se calmer. En même temps, il avait du mal à se faire une raison : oui, Evan avait tenté de se faire du mal et c'était trop compliqué à accepter pour son esprit. Cela voulait dire qu'il était malheureux, et c'était forcément de sa faute parce que si il avait réellement pris soin du brun, il en serait jamais arrivé à avoir cette idée en tête. Il aurait aimé être son super hero, celui qui pouvait le protéger tout le temps en toute circonstance, mais il se rendait compte que cela n'était pas possible.

Il essaya de se concentrer sur ses mots, ses sentiments mais il ne pouvait pas s'empêcher de le prendre personnellement même si Evan disait le contraire.

- Je voudrais toujours de toi. C'est ça le problème. Je te veux trop, Evan, avoua-t-il impulsivement.

Il mordit sa lèvre inférieure suite à ses dires. Il ne fallait pas qu'il aille trop loin. Ce n'était pas bon pour Evan. Il ne pouvait pas l'avoir. Il n'avait pas le droit de juste y songer. Il embrassa son front et ajouta :

- On s'en fou des autres. C'est toi et moi. Mais... Dis moi qu'est ce qui t'as poussé à faire ca...? Tu me promets que c'est personne qui t'as fait ça, hein...? Sinon je le retrouve et je le tue.

Il avait toujours mal, mais bon, il faisait avec.

- Je pensais que tu étais heureux avec moi... Souffla-t-il, la voix attristée.

Il sentait combien il avait déçu Hellias. Il sentait bien qu'il avait déçu plein de monde mais Hellias, c'était pire. Il aurait voulu reprendre le couteau et continuer sans arrêter. Au lieu de ça, il posa sa tête contre l'épaule d'Hellias et il murmura:

"Je sais même pas qui c'est... Non c'est moi Hellias... J'ai cru que ça pourrait m'apaiser... apaiser tout le monde. Mais au contraire, ça te rend malheureux, ça me rend coupable... J'ai eu peur de ne pas être à la hauteur.. J'ai eu peur que mes amis me détestent... Je me fais des peurs tout seul... Des films dans ma tête qui m'angoissent.... Hellias, je tiens à toi.. tu es la seule personne sur cette terre, capable de me comprendre... Capable de me rassurer..."

Il s'interrompit un moment et il caressa sa main. Ce n'était pas grand chose mais ça le rassurait. Et les mots d'Hellias, aussi. Il voulait bien de lui. Alors il reprit:

"Depuis que je suis tout petit, mon père m'a toujours dit que j'étais bon qu'à faire fuir les gens... j'ai fait fuir ma mère...Elle est partie à cause de moi.. je l'ai jamais connu... Mon père me frappait pour un oui pour un non. Il m'insultait et il m'a même dit que j'aurais l'âge, il me mettrait à la rue... J'ai grandi avec cette idée... Et puis t'es arrivé... tu es devenu mon modèle, celui pour qui je serais prêt à tout. Tu m'as redonné espoir... espoir que je pourrais être quelqu'un... Et aujourd'hui... Je lis dans tes yeux que je peux être quelqu'un... Mais y a ma famille d'accueil... elle me déteste.... et ma peur d'enfant est revenue. Alors je me suis accroché à toi... je me suis accroché à mes amis... et depuis quelques temps, j'ai l'impression que tout se casse autour de moi...."

Il s'interrompit de nouveau, histoire de ravaler le sanglot qui menaçait d'éclater et il continua:

"Hellias, y a que toi en qui j'ai réellement confiance.. y a que toi qui pourra me guider, me sortir du noir permanent dans lequel je me suis enfermé... Tu as dit vouloir de moi mais moi je veux de toi aussi... Hellias... Je suis amoureux... enfin de ce que je peux savoir de ce sentiment... et c'est de toi dont je suis amoureux..."  

Les peurs de voir surgir Arlo encore une fois entre eux, s'apaisa peu à peu. Il devenait paranoïaque à force de l'avoir côtoyé, de l'avoir vu agir. Il avait eu tellement peur de perdre Evan. Son Evan. Celui-ci lui expliqua ce qu'il avait sur le cœur, la noirceur qui l'habitait en permanence. Il ne l'avait pas coupé, craignant qu'il ne s'arrête alors que pour la première fois depuis leur rencontre, il s'ouvrait enfin sur ses sentiments. Il voulait tout entendre, même si sa peine le transperçait.

Pour seule première réponse à ses dires à la fois beaux et tristes, il enferma visage d'Evan entre ses mains, et l'embrassa passionnément. Il passa ses mains dans ses cheveux, celles-ci glissèrent lentement sur son coup, et il vint le rapprocher d'autant plus près de lui. Ce contact était puissant. Des milliers de frissons parcoururent son corps. Lui aussi était amoureux. A court de souffle, il se détacha doucement de ses lèvres et souffla :

- Je sais pas si tu pourras un jour te détacher de toutes les horreurs que tu as connu. Je sais pas si un jour tu pourras avoir pleinement confiance en toi, tes capacités, et enfin t'accepter comme la merveilleuse personne que tu es. Mais je sais que je ferai tout pour toi. Je ferai tout pour que ton beau sourire s'accroche à ton visage. Je ferai tout pour te rendre heureux, pour que tu prennes conscience que tu es la plus belle chose qui me soit arrivée.

Il marqua une pause, les yeux rivés sur son poignet.

- Mais je veux pas te perdre. Tu comprends ça ? Je survivrai pas sans toi. J'ai pas envie de survivre sans toi. Tu sais, ton père, ta famille d'accueil... Ils ont tout fait pour te détruire. Mais ils n'y arriveront jamais parce que je suis là. Parce que tu sais que je serai toujours là pour toi. C'est en partie aussi parce que je... Crois que je ressens des sentiments forts pour toi. Et je me vois pas te quitter.

Il avait lui aussi ouvert son cœur, chose qu'il n'avait jamais fait. Égoïstement, cela ne le dérangeait pas que Evan ne faisait confiance qu'à Hellias. D'ailleurs, il n'était pas forcément pour qu'il soit énormément entouré, mais il avait besoin de le savoir en sécurité, surtout quand il ne pouvait vraiment pas être avec lui. Il l'aimait, vraiment trop, mais il avait peur de ne pas assurer sa protection. Il avait peur de lui attirer trop de problèmes. Mais pour le moment, il ne voulait rien gâcher.

Evan s'installa sur Hellias et se blottit contre lui. Peut être que c'était un geste enfantin, mais ça le rassurait. Hellias l'aimait. Oh il aurait voulu lui montrer. Il aurait voulu lui sourire et lui montrer combien ces quelques mots le rendait fou de bonheur. Mais il n'arrivait toujours pas à sourire. Il garda la main d'Hellias et il murmura alors:

"Tu ne me perdras pas... je te promet que je recommencerais plus... j'étais juste tellement mal que je savais plus quoi faire pour que ça s'arrête... Hellias...je veux vivre avec toi pour toujours... je veux plus jamais rentrer chez moi... Ni même aller dans une autre famille... c'est avec toi que je veux rester..."

Il le regarda enfin dans les yeux et il embrassa ses lèvres une nouvelle fois. Et il entoura son cou avec ses bras. Un mélange entre une attitude d'amoureux et celui d'un enfant. Et peut être qu'Evan mélangeait ça. Puis il reprit :

"Tu sais.. .y a Orion qui nous espionne... et il raconte tout à James et Arthur... et je me suis emporté contre eux parce que j'ai eu peur..."

Encore une fois, Evan montrait une attitude de bébé et il avait encore une fois peur qu'Hellias ne se lasse de tout ça. Il soupira et se réinstalla contre lui. Il recherchait juste son attention pour le moment et son affection aussi.  

Mais Evan ne voulait pas qu'Hellias le laisse seul. Il avait peur pour lui, peur qu'Orion ne lui fasse du mal. Alors il attrapa la main d'Hellias et il secoua la tête avant de dire:

"Reste avec moi Hellias.... Je ne veux pas rester seul.... Je ne peux pas.... j'ai besoin de toi...."

Il plongea son regard dans le sien. Evan avait besoin d'attention et de calins. Il avait besoin d'être rassuré sur le fait qu'Hellias ne le laisserait jamais tomber. Et il avait peur, encore une fois. Peur d'avoir tout perdu. Une énième fois, il perdait confiance en lui. Mais il avait promit à Hellias qu'il ne recommencerait plus alors il se contenta de se jeter dans ses bras.

"Hellias je t'ai promis que je ne recommencerais pas mais j'ai peur que tout le monde me laisse tomber.... je ne suis pas comme les autres... je suis rien du tout... tu vas te lasser de moi...."  

Et l'angoisse le reprenait. Il avait pensé perdre Hellias à tout jamais. Peut être que plus jamais personne ne voudrait de lui et encore plus qu'il serait obligé de quitter Bristol parce que la honte d'être Evan Winslow lui tomberait dessus. Ce n'était qu'un gamin maltraité de plus.  

Même s'il était d'accord avec les mots d'Hellias, Evan avait peur que Byron lui tombe dessus et le ramène à la maison. Et ça, il ne le voulait pas. S'accrochant très fort à Hellias, il murmura:

"Je préfère qu'Orion se mêle de ma vie plutôt que Byron arrive et vienne m'arracher à toi.... j'ai peur Hellias... parce que Byron c'est comme mon père... on dirait qu'ils se sont mis d'accord pour faire de ma vie, un enfer... j'ai peur.... je suis terrorisé... et y a que toi pour calmer mes peurs...."

Il tentait de le raisonner, de l'empêcher de faire une bêtise. Il l'implorait même de ne pas le laisser seul. Si pour lui, la plus grande menace à l'heure qu'il était, c'était Byron, il ignorait bien le danger qui courait et qui faisait peur à Hellias. Evan garda sa main et il dit:

"Restons ensemble Hellias.... comme ça je suis sûr que je ne serais pas arraché à toi... je m'en fiche de l'école, je m'en fiche de cette famille, tout ce que je veux c'est rester avec toi...."